Comment recouvrer les pensions impayées ?
Lorsque la pension alimentaire n'est plus
payée par le débiteur, ou épisodiquement..., le parent créancier peut
soit s'adresser à l'agence de recouvrement de sa caisse d'allocations
familiales, soit mettre en oeuvre lui-même un recours.
Chaque mois, 900 000 personnes
attendent une pension alimentaire pour subvenir à l'entretien et à
l'éducation de 1,5 million d'enfants (montant moyen : 170 € par mois et
par enfant). Mais 35 % d'entre ces personnes (soit 315 000 parents pour
plus de 500 000 enfants) sont victimes d'impayés. Pour lutter contre ce
phénomène, une agence de recouvrement des impayés de pensions
alimentaires (ARIPA) a été créée en 2017. Un organisme devenu
incontournable pour récupérer les sommes dues, mais qui ne rend pas
caducs pour autant les recours judiciaires classiques.
L'aide au recouvrement de l'ARIPA
« L'aide au recouvrement est une offre universelle
qui s'adresse à tous les parents séparés, qu'ils soient allocataires de
prestations familiales ou non », rappelle Marie-Christine
d'Avrincourt, directrice de l'ARIPA.Les moyens de l'agence (22 services
au sein des CAF et de la Mutualité Sociale Agricole, employant 360
professionnels experts en recouvrement) lui permettent de couvrir tout
le territoire.Le parent créancier de la pension alimentaire (fixée par
jugement, titre exécutoire ou convention homologuée, pour un enfant de
moins de 20 ans), dès lors que celle-ci n'est plus payée depuis au moins
un mois, peut saisir l'agence directement. Il n'est pas obligé
d'effectuer au préalable un recours auprès d'un huissier de justice.
• À l'amiable. L'ARIPA tente d'abord une démarche amiable auprès du débiteur, qui aboutit à un recouvrement effectif dans 39 % des dossiers.
• Contentieux. Dans la majorité des cas, il
faut monter d'un cran. L'agence est habilitée à recourir à une procédure
semblable à un paiement direct par huissier (sur les salaires, les
indemnités de chômage ou les pensions de retraite perçus par le
débiteur).
« Nous sommes souvent face à des situations d'arriérés importants »,
précise Marie-Christine d'Avrincourt. L'ARIPA peut récupérer jusqu'à 24
mois d'impayés, soit 4 fois plus que dans le cadre d'un paiement direct
par huissier. Lorsque le parent créancier de la pension alimentaire non
payée élève seul son enfant, il peut bénéficier de l'allocation de
soutien familial (ASF), d'un montant de 115,30 € par mois, jusqu'aux 20
ans de l'enfant. L'ASF est versée à titre d'avance, la CAF engageant une
procédure de recouvrement auprès du parent débiteur pour récupérer les
sommes.
« Avec l'ARIPA, c'est une nouvelle dynamique de recouvrement qui a vu le jour », souligne Marie-Christine d'Avrincourt. Cependant, elle n'exclut pas le recours à d'autres procédures.
Le paiement direct par huissier
« Le moyen le plus simple et le moins onéreux pour
recouvrer la pension alimentaire, si le débiteur est salarié, est le
paiement direct », affirme Caroline Fabre, huissier de justice à Paris. « Cela coûte 40 € TTC, à la charge du débiteur ».
Le paiement direct fonctionne comme le prélèvement à la source pour les
impôts : le montant de la pension est prélevé directement sur le
salaire du débiteur (ou sur sa pension de retraite, son indemnité de
chômage). Dans les 8 jours à compter de la demande, l'huissier saisi par
le créancier notifie le paiement direct au tiers concerné (employeur,
caisse de retraite, Pôle Emploi...), qui a dès lors l'obligation de
verser directement le montant de la pension à son destinataire. Les
sommes qui peuvent être recouvrées par le paiement direct sont les
mensualités à venir et l'arriéré impayé dans la limite des six dernières
échéances. Au-delà de 6 mois d'arriérés, et dans la limite de 5 ans, il
faut recourir aux autres saisies.
D'autres modes de recouvrement
« Hors
paiement direct, les voies d'exécution que nous utilisons
pour recouvrer les pensions impayées sont, dans l'ordre, la saisie sur
compte bancaire, la saisie au domicile et la saisie sur salaires », explique Caroline Fabre.
•
La saisie sur compte bancaire (ou
saisie-attribution) est notifiée par l'huissier à la banque du débiteur
de la pension, ce qui permet de bloquer le compte pendant les 15 jours
qui suivent. Il n'est pas nécessaire de passer par le tribunal, dès lors
qu'un titre exécutoire (jugement fixant la pension, notamment) a déjà
été établi. « C'est la saisie la plus rapide, et elle a l'avantage d'être une procédure surprise », souligne Caroline Fabre. « Mais elle présente l'inconvénient d'être ponctuelle ».
• La saisie de biens mobiliers (ou saisie à
domicile) a plutôt une efficacité indirecte : l'arrivée d'un huissier,
accompagné d'un serrurier et de deux témoins, pouvant impressionner...
• La saisie sur salaires, pas simple à mettre
en oeuvre, elle oblige à passer par une audience de conciliation devant
le tribunal d'instance. Par ailleurs, les montants dus sont bien
prélevés, mois après mois, sur la rémunération du débiteur, mais ils ne
sont reversés au créancier (par le tribunal) qu'après des délais assez
longs.
• Recouvrement public. Quand l'une ou l'autre
de ces procédures n'a pas pu aboutir, le créancier peut adresser une
demande de recouvrement public au procureur de la République. Cette
démarche permet de faire intervenir le Trésor, le débiteur devant
désormais payer la pension au percepteur, lequel dispose des mêmes
moyens de recouvrement que pour les impôts. Comme le paiement direct par
huissier, le recouvrement public permet de recouvrer jusqu'à 6 mois
d'arriérés de pension alimentaire.
Si le débiteur n'habite pas en France...
Le parent qui perçoit la pension doit
s'adresser au ministère des affaires étrangères, au bureau du
recouvrement des créances alimentaires (RCA). C'est ce service qui
adresse ensuite le dossier à l'autorité centrale de l'État dans lequel
réside le débiteur. Si celui-ci habite dans un pays membre de l'Union
européenne, la procédure est en principe facilitée grâce à un règlement
de 2008 sur l'exécution des décisions et la coopération en matière
d'obligations alimentaires.
(Bureau du recouvrement des créances alimentaires, ministère des affaires étrangères, 27 rue de la Convention, CS 91533, 75732 Paris Cedex 15, Tél : 01 43 17 90 01).
Propositions
Pour en finir avec les impayés de
pensions alimentaires, le Think tank « Terra nova » propose qu'une
Agence soit chargée, non plus seulement de recouvrer les pensions
alimentaires non payées, mais de les percevoir elle-même, pour les
reverser aux parents créanciers (sur le modèle de ce qui se fait au
Québec depuis 1995). En cas de carence du débiteur, l'Agence
continuerait de verser la pension au créancier, jusqu'à hauteur d'un
montant minimum. Par ailleurs, Terra nova propose de rendre obligatoire
la médiation.