Quand le silence est d’or !
HAUTEVILLE GONDON - Les Plans
Dans son petit atelier où la température doit rester relativement basse avec un taux d’hygrométrie relative, César travaille sur le cadre d’un miroir du 18° siècle, époque « Révolution ». la fresque porte un attribut guerrier en bois sculpté, avec un bonnet phrygien, des feuilles de laurier, des ailes de phénix, une épée et un fusil de la Révolution.
Toute la dorure et les apprêts ont disparu. César travaille sur cette fresque avec du papier verre très fin. Le bois a retrouvé l’éclat du naturel et la restauration des pièces de bois reste un long travail de patience.
C’est dans le calme que ce travail d’artisan, d’artiste s’exécute. Au rythme des saisons, le silence est parfois rompu par quelques moineaux sur le rebord de sa fenêtre, on ne voit que le bal incessant des outils de travail que sont les pinceaux qui portent les noms de mouilleux, d’appuyeux, la brosse à chienner en poil de sanglier, les fers à « reparer » nécessaire pour refaire les reliefs et les minutieux détails des sculptures après le passage « des blancs »,la pierre à brunir, les dents de loup pour brunir les feuilles d’or, la palette pour transporter la feuille d’or, mais aussi l’agate afin d’obtenir le « quincan » de l’or afin qu’il brille de tous ses éclats… après de longues heures passées à frotter.
Alors avec passion pour ce métier qu’il « adore » César disparaît dans ses pensées, plus rien n’existe car à cet instant précis commencent les quinze opérations qu’il faudra mettre en œuvre avant de poser la feuille d’or.
Ainsi débutera le passage d’une première couche de « blanc de Meudon » ou « blanc d’Espagne » qu’il passera avec une sorte de colle à base de peaux de lapin, qui sert à polir les surfaces et facilite le brunissage. Ces couches successives sont des durcisseurs qui procureront à la feuille d’or une véritable assise. Mais avant cette opération, il faudra qu’il s’applique à recouvrir « ces blancs » avec une argile toujours à base de peaux de lapin, précieusement conservée dans un « bol d’Arménie » . Ainsi appliquée elle offrira à la précieuse feuille, une surface lisse et cohérente : « ce durcisseur devient comme de la porcelaine ! » dira César.
La moulure devra être mouillée avec de l’eau « ça va réveiller la colle qui a séché, et la feuille d’or va être comme aspirée par la colle ainsi ramollie un instant ! » dira t il, pour terminer par un vernis de protection.
Pourtant en aucun moment, César, n’a touché de ses mains de ses doigts ces précieuses feuilles d’or « qui se dissolvent au contact de l’acide des mains » Alors il faudra sortir de son étui cette brosse faite de poils de Martre, qu’il passera à plusieurs reprises dans ses cheveux afin de créer un champ d’électricité statique et ainsi soulever et manipuler ces feuilles d’or.
Ces feuilles d’or sont fabriquées par un dernier « batteur d’or » qui est installé en Haute Savoie et qui est aussi le fournisseur auprès des restaurateurs d’œuvres d’art au Louvre, à Versailles .
La découverte de ce métier permet d’accéder à un vocabulaire peu commun. De cette technique acquise, César restaure également ces "angelots" qu'il rencontre aux détours de ses travaux afin de redonner tout l’éclat à ces dorures qui, sur le fronton des retables, nous émerveillent.
Élève de Jacques Dossetto, Maître Doreur à Carpentras, César a acquis la technique de ces gestes qui sont ainsi sortis de l’oubli. Il a comme projet de transmettre ces gestes « aux gens d’ici » afin que perdure la précision de ce travail de restauration d’une époque dorée. César confectionne également des bancs, des cadres, des miroirs, du mobilier et des portes d’une authenticité remarquable.
Si vous passez à Hauteville-Gondon, allez donc pousser la porte de son atelier, César ne fait pas de bruit, il travaille dans un silence d’or et intervient actuellement dans le cadre de la restauration de l'église Saint Martin de Tours à HAUTEVILLE GONDON !
Pierre Villeneuve