Les droits du couple sur son logement
Lorsque
l'on habite ensemble sous le même toit, que l'on soit locataire ou
propriétaire, chacun peut bénéficier de droits sur le logement ou en
recevoir en étant marié ou pacsé. C'est différent pour les concubins...
Le logement est souvent le principal élément
de patrimoine du couple. Mais il est fréquent qu'avant d'être
propriétaires de leur toit, les conjoints ou concubins restent un
certain temps en location. Quels sont leurs droits et obligations
vis-à-vis du propriétaire bailleur ? Est-ce qu'ils sont responsables à
égalité quels que soient leurs efforts financiers respectifs ? Et qu'en
est-il lorsqu'ils deviennent propriétaires ? Les questions sont les
mêmes, que le couple soit marié ou non, mais les réponses diffèrent.
Surtout quant au devenir de ce bien particulier qu'est le logement
conjugal en cas de décès.
Un bail, deux titulaires égaux
Quand le logement est en location, la
principale question qui se pose est de savoir qui est responsable du
paiement du loyer et des charges, puisque c'est la principale obligation
qui existe à l'égard du bailleur. Dans le cadre du mariage, le statut
du logement loué est réglé par le code civil. Que le bail ait été signé
par un seul conjoint ou les deux, les époux sont automatiquement
cotitulaires du contrat de location, même s'il avait été conclu avant le
mariage (article 1751 du code civil). "Il n'est pas nécessaire de
procéder formellement à une réfection du contrat de bail initial, ni
d'adosser à ce dernier un avenant en ce sens ", explique Nathalie
Couzigou-Suhas, notaire. Ensuite, c'est-à-dire en cours de location,
c'est le principe de "cogestion" qui prévaut : les conjoints ne peuvent
rien faire l'un sans l'autre, y compris résilier le bail. Une des
principales conséquences de ces règles (qui s'appliquent à tous les
époux quel que soit leur régime matrimonial) est que le bailleur peut
demander le règlement du loyer et des charges à l'un ou l'autre des
époux.Et les partenaires pacsés ? "Depuis la loi ALUR de l'année
dernière, ils sont cotitulaires du bail comme des personnes mariées,
mais à condition qu'ils en fassent la demande ensemble, car ce n'est pas
automatique", précise Nathalie Couzigou-Suhas. Même s'ils ne font
pas cette démarche, ils répondent quand même solidairement des loyers et
des charges, au titre des dépenses courantes. Dans le cadre du
concubinage, en revanche, le bailleur ne connaît que le locataire en
titre. Sauf si les deux concubins ont choisi d'être colocataires en
établissant un bail aux deux noms.
Logement acheté : protection optimale du couple marié
Quand le couple achète son logement, qu'il
soit marié ou non, il fait le pari d'une certaine pérennité. En général,
c'est un engagement sur le long terme.Dans le cadre du mariage, l'un
des conjoints ne peut pas disposer seul des droits sur le logement
(article 215 du code civil). Cette règle s'applique même en cas de
séparation de biens. Exemple : Françoise et Jean-Marc sont mariés sous
la séparation de biens, et le logement du couple appartient seulement à
Jean-Marc qui l'a financé en partie avec un héritage (voir ci-contre).
Bien que l'épouse, Françoise, n'ait aucun droit de propriété sur le
logement, son habitation est protégée. Concrètement, son mari ne peut ni
vendre, ni donner le bien sans l'accord exprès de son épouse. Cette
protection ne joue que pour la résidence principale de la famille, pas
pour la résidence secondaire.
Dans le cadre du Pacs ou du concubinage, il
n'existe pas de protection particulière équivalente. Si le logement a
été acheté en indivision (voir p. 35), la seule protection réside dans
le fait que les partenaires ou les concubins doivent gérer le bien
ensemble (principe de la cogestion). En cas de litige, il est possible
de sortir de l'indivision et de demander le partage judiciaire. "Une issue qui joue plus comme une menace, pour inciter à un accord amiable", souligne Benoît Morel, notaire à Paris.
Quel devenir en cas de décès ?
Le logement est un bien d'une nature
particulière. C'est le lieu de vie du foyer familial qui constitue un
havre de stabilité et de sécurité. À cet égard, il est indispensable de
s'interroger sur ce qu'il pourrait devenir en cas de décès de l'un des
deux propriétaires selon que le couple est marié ou pas. Si le couple
est marié, le droit au maintien dans le logement est pratiquement
toujours garanti pour le conjoint survivant. "Quand je reçois des personnes en situation d'acquisition, je leur demande s'ils veulent se marier", explique Frédéric Roussel, notaire à Lille. "Et
en cas de réponse négative, je leur conseille de conclure un Pacs et de
rédiger un testament, pour qu'en cas de décès le bien revienne au
survivant, hors droits de succession". Par ailleurs, lorsque le
partenaire survivant se retrouve en indivision avec les héritiers de son
partenaire décédé, il peut demander l'attribution préférentielle du
logement qu'il occupe à l'époque du décès. Si cette attribution a été
prévue dans le testament, on ne peut pas la lui refuser. Enfin, mais
seulement pour une année à compter du décès, le partenaire bénéficie
d'un droit de jouissance temporaire du logement, à titre gratuit,
exactement comme un conjoint survivant. Attention, toutes ces
dispositions protectrices n'existent pas pour les concubins !
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Son "propre" toit
Quand le couple est marié sous le
régime de la communauté, le logement qu'il acquiert pendant le mariage
est un bien commun. Mais que se passe-t-il si le financement provient de
biens qui appartiennent à un seul époux, par exemple parce qu'il en a
hérité de ses parents ? "Pour que le logement garde un statut de
bien propre, il faut établir dans l'acte d'achat une convention
précisant qu'il est acheté avec des fonds propres (emploi), ou grâce à
la revente d'un bien propre (remploi)", précise Frédéric Roussel, notaire à Lille.