Devenir indépendant
OSEZ FRANCHIR LE PAS !
Aucun
diplôme exigé, pas de capital obligatoire, cotisations sociales
proportionnelles au chiffre d'affaires... Le statut d'auto-entrepreneur
ne manque pas d'arguments pour qui veut créer son entreprise et
compléter ses revenus.
Depuis la création du régime de
l'auto-entreprise en 2009, plus d'un million de particuliers se sont
lancés dans l'aventure (un créateur d'entreprise sur deux). Evidemment,
la réussite n'est pas garantie: seuls 53 % ont réalisé un chiffre
d'affaires en 2014. Pourtant, avec la crise économique qui dure, des
salaires qui n'augmentent plus, des pensions de retraite non
revalorisées et un chômage endémique, le statut très simple de
l'auto-entreprise peut être la solution pour débuter ou trouver un
complément de revenus.
RÉPONSE AUX BESOINS DE CHACUN
Pour le créateur du dispositif et actuel président de l'Union des auto-entrepreneurs, François Hurel, "
le régime répond à tous les cas de figure en permettant à chacun de
créer, comme il le souhaite, une activité à plein temps ou de l'exercer à
titre complémentaire ". De leur côté, en 2008-2009, les pouvoirs publics mettaient déjà en avant l'aspect financier. "
Un statut pour gagner plus
" déclarait alors Hervé Novelli, le secrétaire d'État aux PME. "
Une arme anti-crise
" permettant à chacun de compléter ses revenus. En
devenant auto-entrepreneur, le salarié peut ainsi compléter ses revenus
avec une activité annexe ou préparer en douceur sa future reconversion
en testant la faisabilité de son projet " grandeur nature " avant de
démissionner, sa seule contrainte étant de respecter l'éventuelle clause
de non-concurrence inscrite dans son contrat de travail.
Pour un retraité, il peut s'agir d'améliorer
son pouvoir d'achat ou simplement de rester actif tandis que, faute de
postes proposés, le chômeur peut vouloir prendre son destin en main en
créant son propre emploi et réintégrer ainsi la vie active. " Sur nos 75000 adhérents, 60 % exercent leur activité pour compléter leurs revenus " déclare Grégoire Leclercq, président de la Fédération des auto-entrepreneurs.
STATUT OUVERT À TOUS
Salarié, fonctionnaire, étudiant, retraité,
travailleur indépendant, chômeur... tout le monde peut donc devenir
auto-entrepreneur. Seules certaines professions ou activités soumises à
des réglementations spécifiques sont exclues du régime (marchand de
biens, lotisseur et agent immobilier, officier public et ministériel,
opérateur sur les marchés financiers...). Pour les autres (professions
non réglementées), il suffit de s'inscrire, gratuitement, au :
- registre du commerce et des sociétés (RCS) pour exercer une activité commerciale ;
- répertoire des métiers (RM) pour se lancer dans une activité artisanale.
Les activités libérales (conseil, par exemple), quant à elles, ne requièrent aucune inscription.
Une seconde formalité a été ajoutée, cette
année, pour ceux qui veulent exercer une activité artisanale. Ils
doivent désormais suivre un " stage de préparation à l'installation " de
5 jours auprès des chambres des métiers et de l'artisanat. " Au fil du temps, on a complexifié un régime très simple avec ces formalités qui n'existaient pas avant " regrettent François Hurel et Grégoire Leclercq.
Chiffre d'affaires à ne pas dépasser
L'auto-entreprise est soumise à un plafond de
chiffre d'affaires annuel (proratisé selon la date de création) qui ne
doit pas, en principe, être dépassé sous peine de basculer dans le
régime de l'entreprise individuelle " classique " (et de devoir payer
des cotisations minimales forfaitaires) :
- 82 200 € pour une activité de vente de marchandises, objets, fournitures et denrées alimentaires ;
- 32 900 € pour la réalisation de prestations de services ;
- 32 900 € pour les professions libérales.
Aucun dépassement des plafonds n'est toléré la
première année d'exercice. Les années suivantes, un dépassement est
toléré s'il ne se reproduit pas deux années consécutives et s'il reste
contenu entre :
- 82 200 € et 90 300 € (pour la vente) ;
- 32 900 € et 34 900 € (pour les services et les professions libérales).
Ces plafonds sont figés depuis plusieurs années. Ce que déplore Grégoire Leclercq, de la Fédération des auto-entrepreneurs, "
ça crée un effet de seuil et dissuade certains de développer leur entreprise, de peur de franchir le plafond
".
Depuis le 1er janvier 2015, un
sous-plafond a été instauré afin d'obliger l'auto-entrepreneur à
effectuer sa déclaration de chiffre d'affaires uniquement sur Internet
(www.lautoentrepreneur.fr) lorsque celui-ci dépasse un certain seuil :
- 41 100 € pour une activité de vente ;
- 16 450 € pour une prestation de services.
L'autre particularité du régime porte sur la
franchise de TVA. Les auto-entrepreneurs ne la facturent pas à leurs
clients et, inversement, ils ne la récupèrent pas sur leurs propres
achats. Ce qui peut d'ailleurs parfois créer des difficultés.
CHARGES SOCIALES MODULÉES
Une autre dérogation au droit commun des
entreprises concerne les charges sociales avec un traitement plutôt
favorable. En effet, l'auto-entrepreneur est soumis au régime
micro-social et il est dispensé de toute charge lorsqu'il ne réalise
aucun chiffre d'affaires (CA). "Celui qui ne facture rien ne paie rien " résume François Hurel, "c'est rassurant et simple ".
Mais la mansuétude des pouvoirs publics est
limitée car l'absence de tout chiffre d'affaires pendant 24 mois
consécutifs entraîne la radiation pure et simple de l'auto-entreprise.
Et sur les encaissements de
l'auto-entrepreneur, le taux forfaitaire des charges sociales
personnelles (assurance maladie, allocations familiales, assurance
vieillesse, etc.) est fixé à :
- 13,3 % du CA pour l'entreprise dont
l'activité consiste à vendre des marchandises, objets, fournitures et
denrées alimentaires ;
- 22,9 % pour les prestations de service et les activités libérales.
"
C'est le bon côté de la loi Pinel en 2014 qui a baissé de 1,7 % nos charges sociales
", rappelle Grégoire Leclercq.
COMMENT PROTÉGER SON PATRIMOINE ?
En principe, un entrepreneur individuel
(l'auto-entrepreneur en est un) répond de ses actes professionnels sur
l'ensemble de son patrimoine. Avec les conséquences que l'on imagine en
cas de difficultés financières (factures impayées, chute du CA, etc.).
Deux procédures permettent aux auto-entrepreneurs de limiter l'étendue
de leur responsabilité professionnelle face à leurs créanciers.
La première solution consiste à déposer une "
déclaration d'insaisissabilité " auprès d'un notaire. Elle permet de
mettre à l'abri des créanciers un bien non affecté à l'activité comme,
par exemple, son habitation.
L'autre possibilité consiste à opter pour le
statut d'entrepreneur individuel à responsabilité limitée (EIRL). Ici,
la démarche est inverse puisqu'elle consiste à désigner les biens
affectés à l'activité professionnelle (véhicule, machine-outil,
matériel, etc.). Seuls les biens mentionnés dans ce " patrimoine
d'affectation " sont susceptibles d'être saisis par les créanciers. La
formalité s'effectue au greffe du tribunal de commerce.
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Gare aux effets pervers
La souplesse du régime ne doit pas occulter certains inconvénients.
Tout d'abord, les charges sociales et
l'imposition sont calculées sur la base du chiffre d'affaires réalisé
et non pas sur les bénéfices (voir p. 36). Or, comme il n'y a pas de
notion de déficit fiscal pour les auto-entreprises, le créateur peut
être amené à payer des impôts sur la base d'un résultat final pourtant
négatif si ses charges réelles (factures, frais de déplacement,
loyers, etc.) dépassent son chiffre d'affaires.
L'absence de TVA à répercuter aux
clients simplifie certes les obligations comptables (pas de déclaration
ni de paiement de TVA à adresser aux Impôts) mais, inversement, elle ne
permet pas de récupérer celle facturée par ses propres fournisseurs. Et
certaines entreprises rechignent à travailler avec un auto-entrepreneur,
faute de pouvoir récupérer elles-mêmes la TVA !