Salut l'artiste ! |
Jeune de 60 ans, Bernard Rosat, vient de rejoindre les siens entre cette terre de Peisey-Nancroix, les soleils de Bormes les Mimosas et sa petite maison dans la forêt de Saint-Come, située à la source de la Baie de Saint-Laurent au Québec.
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Bernard était né au matin du 16 novembre 1957 à Aime. Élevé avec ses 6 frères et sœurs à Peisey-Nancroix. Son père Edmond travaillait aux mines d’ Aime, alors qu’ Élisa sa maman, a pu élever cette bien belle famille dont tout un chacun était fier. Scolarisé au collège Saint-Exupéry, Bernard avait compris qu’il fallait très tôt troquer les bancs de l’école pour entrer dans la vie active et ainsi soulager la charge de famille de ses parents. Il entre en apprentissage à 14 ans à la boucherie boraine « Dereymez », obtient son CAP, prend son sac à dos et va aller à la rencontre de ce métier de boucher qui le passionne.
Il deviendra ouvrier chez son beau-frère, puis prendra cette route des savoir faire en se rendant à Saint-Tropez, reviendra aux Arcs et décidera de rejoindre cette ligne d’horizon aux bords de la méditerranée à Bormes Les Mimosas.
Une martingale à la gloire des Soleils du Var
Ainsi Bernard, mais aussi son épouse Jacqueline et sa fille Frédérique vont, dans un trio de tous les matins, donner du rythme, du plaisir à cette boucherie très prisée. Le magasin ne désemplit pas, les clients..pardon les ami(e)s, vont se presser dés les premiers bruits de sa grille afin d’attendre, de patienter. En effet Bernard proposait « l’irréprochable ! » Une qualité de viandes d’exception. Le goût, la présentation, la tendresse, Il avait l’art de composer une gestuelle capable de donner du corps à la bête. Ainsi va se construire un « garçon étonnant ». Derrière son étal, le bruit de ses couteaux allait se fondre autour de son fusil. Dans ce charme il y avait ces mots qu’il chantait, à chaque client il y avait cette précision, cette connaissance, il devinait les goûts et les morceaux choisis, tirés de cette partition écrite de sa main.
Dans le rétro, il était temps de lire dans les cernes
Bernard va donc mettre un terme à ce parcours de vie fait de travail, oubliant parfois que le sommeil n’avait pas de prise sur lui. Il va donc baisser le grand rideau de sa vie professionnelle. Besoin de repos, de repli, besoin de nature, de paix, de calme il trouvera un havre de paix au Québec, dans le Comté du Matawinie, dans le Lanaudiére : Saint Come. Petite village touristique en pleine nature, prés du lac Saint Pierre, équipé d’uns station de ski, prés des rivières à saumon, à côté de ces forêts d’orignal, prés des cabanes à sucre sinon des parfums de sucre d’érable. C’est là qu’il enfoncera encore plus profond son désir de garder l’essence même de cette nature qui l’a fait grandir dans la vallée du Rosuel. Ainsi il va se fondre dans les sentiers escarpés à chasser sous réserve que le combat soit loyal, égal, sinon de baisser le canon et être heureux et fier de voir le gibier s’éloigner. Fier de relancer ce saumon ou cette truite, complice avec ses boules de pétanque qu’il partageait sur ces pistes de toutes les amitiés.
Bernard a su donner sa vie durant, mais il a donné avec sa manière à lui, il a donné, droit dans ses yeux marrons clairs, il a donné avec ces mains qui ont fabriqué les bonheurs de Jacqueline son épouse, de Frédérique sa fille et son compagnon Axel et leurs deux enfants Elias et Léa. Généreux, homme de partage, il y avait en lui quelque chose de solitude afin de consommer les odeurs, senteurs et images de ces paysages qu’il imprimait dans sa joie de vivre.
Je reviendrai sur mes terres
Cette décision, il l’avait confiée à ses frères et sœurs, à ses nièces et neveux à toutes celles et ceux en qui il se reconnaissait. En ce 28 avril, alors que le temps montrait sa colère entre froid et pluie glaciale, les portes du Ponthurin allaient ouvrir ses montagnes, la terre devenait linceul, le cri des gypaètes barbus sonnaient ce moment lugubre...Bernard revenait sur ses terres, le glas emportait l’émotion de toute une famille resserrée, renversée face à cette injustice de quitter Bernard à l’âge de 60 ans, une voix corse s’élevait, il pouvait partir puisqu’il avait tout donné sans rien attendre !
Pierre VILLENEUVE