NINI…LA DOYENNE
DU VILLAGE NOUS A QUITTES !
Marie, Eugénie ARTAZ, plus connue sous son diminutif
affectif « NINI » après 94 ans d’une vie intense, dure, vient donc
de quitter ce monde chapelain qu’elle aimait tant. C’est une véritable bibliothèque du village,
qui vient de disparaître, et d’aller
faire dormir ses yeux doux, tendres, aimants, pour l’éternité et d’emporter
avec elle toute l’affection qu’elle portait à ses enfants. Son point d’orgue restera ses petits enfants qu’elle couvait dans sa maison familiale au cœur du
village, là où le bonheur distribuait à l’envi, cette douceur de vivre.
Un
toit, un cantou, une communauté de vie, un amour partagé.
C’est ainsi une bien belle histoire qui vient de se
terminer dans cette maison pleine de souvenirs...Mais écoutez plutôt !
« Dans cette maison de Bernard Têtu, disparu
récemment, vivait Joseph son frère, leur maman Pierrette, Nini et ses deux
filles Georgette et Patricia, avant que ces dernières ne s’échappent de ce nid
bien douillet ! »
Par la générosité de Bernard, une vie va donc
s’écouler au rythme de la vie à la
ferme. La vie va se dérouler autour de
quelques tarines, un jardin, une basse
cour, sous l’œil vigilant de « Mirka » sentinelle de la garde du
bétail.
Nini, égale à un homme dans son
travail
Ne vous y trompez pas Nini, accomplissait dés la rosée du matin et jusqu’à l’angélus du
soir, ce travail des champs, fondamental. Les prés de fauche étaient sa
passion. Sa faux en était son outil de travail. A chaque instant, au gré des
saisons, Nini n’ avait de cesse de
confectionner ces andains et donner du lustre aux senteurs de ce foin tiré à la
terre chapelaine. Malgré sa force, sa
détermination et sa conscience imperturbable du respect de cette herbe sacrée,
elle avait recours à une aide pour voyager sa récolte et de négocier ses
barillons, ses drapets contre 3 jours de corvées.
Elle gardait en elle ce savoir faire de la tomme de
ménage, qui s’affinait sur les « trablas » régalant celles et ceux qui avaient ce privilège
de s’assoir à sa table, le tout savouré, avec les fameuses pommes de terre
incomparable de Nini.
Mais Nini, qui étiez-vous vraiment ?
Femme dure au travail comme dans la vie, exigeante
pour elle...mais aussi les autres, au caractère trempé, elle avait, en elle,
une montre biologique réglée l’heure des saisons. « Elle était un
almanach savoyard à visage humain ». Nini avait en elle quelque chose
d’étrange. Les excès n’avaient pas le droit de faire partie de sa vie "y
a no peu " … « Il y en a assez » disait-elle !
Rompue à toutes les tâches, elle assumait les lessives
et confier au vent le séchage du linge...Coquette, Le repassage était une tâche
qu’elle affectionnait. Son vrai bonheur passait dans la préparation de la soupe
du soir composée des légumes de son jardin.
Mais le meilleur était ses petits enfants. Qu’ils
sachent, malgré la douleur de son départ, qu’ils ont hérité de la sagesse de Nini. Elle leur a montré ce
chemin de la dignité, du respect à l’heure de ces séances de goûter mémorables,
Nini, c’était avant tout « un esprit de famille ! »
Nini
n’est donc pas partie,
elle juste de l’autre côté du chemin
Si ses yeux se sont fermés, si son cœur ne bat plus,
que celles et ceux qui ont connu ce bonheur d’approcher Nini, n’oublient jamais
qu’elle vous a remis un trésor, un bien inestimable, elle vous a appris, à
l’aune de ses rides, le langage du silence, l’amour de son regard, l’affection
de son cœur doux, tendre, aimant, même si parfois les mots sont restés muets.
Il suffisait de comprendre !
Au revoir NINI, vous n’avez pris qu’un peu
d’avance
Ainsi la doyenne des chapelains s’est absentée,
Maurice Dunand, le prêtre, a permis de nous rassembler dans l’église paroissiale
sous les ors du baroque, et d’écouter l’évocation de Nini, par Brigitte, du Comité Paroissial local.
Nini a rejoint sa sœur Pierrette, Joseph (dit Job), et
ce sacré Bernard. A l’heure des cloches à la volée, son âme est partie vers Peisey-Nancroix,
Ugine, N.D. du Pré et d’aller rejoindre le chemin des étoiles par le dôme de Vaugel.
Il a bien fallu accepter que Nini s’élève dans ce ciel
immaculé d’un bleu apaisant, dommage qu’à l’heure de la séparation, qu’un
hommage, dédié à la doyenne disparue,
n’ai pas été prononcé, celle qui avait dessiné à la sueur de son front,
94 ans durant, les contours de sa passion qu’elle portait à son village.
Pierre VILLENEUVE