Récupérer une pension alimentaire impayée ?
Pourquoi agir ?
Pour ne plus subir d'impayés à l'avenir
Lorsqu'une pension alimentaire ou une
prestation compensatoire n'est plus payée, ou avec un retard
systématique, les conséquences financières peuvent être lourdes pour son
créancier (celui à qui elle est due). C'est pourquoi une procédure très
simple, le « paiement direct », a été mise en place. À condition que le
total des impayés n'excède pas 6 mois, elle permet d'être réglé
directement du montant de la pension, pour l'arriéré ainsi que pour
l'avenir, par l'employeur ou la caisse de retraite du débiteur (celui
qui doit la pension). Pour les arriérés de plus de 6 mois, ce sont les
voies d'exécution classiques qui peuvent être mises en oeuvre (saisie
des biens meubles, des comptes bancaires, des rémunérations...). Dans
tous les cas, une décision de justice doit, au préalable, avoir fixé le
montant de la pension.
Quand le faire ?
Dès qu'une échéance n'est pas réglée
Il est conseillé d'agir sans attendre ! En
effet, il faut se souvenir que le paiement direct est limité aux 6
derniers mois d'impayés. Pour les arriérés plus anciens, le recouvrement
est possible mais il est plus long à obtenir. Les pensions alimentaires
sont payables mensuellement, et d'avance. Leur versement à terme échu
(en fin de mois) n'est pas autorisé et peut donc justifier une demande
de paiement direct. Pour mettre en oeuvre cette procédure, il n'est même
pas nécessaire d'attendre un délai « raisonnable » : elle peut être
lancée dès qu'une échéance n'est pas payée au jour dit. Dans le même
esprit, aucune mise en demeure préalable par lettre recommandée n'est
obligatoire. Enfin, le paiement direct peut être aussi demandé si la
pension est bien payée par son débiteur à la date prévue, mais sans
tenir compte de la revalorisation annuelle, c'est-à-dire de l'indexation
de son montant sur l'indice du coût de la vie. À chaque anniversaire du
jugement (où à une autre date indiquée dans le jugement, le plus
souvent le 1er janvier de chaque année), la pension
alimentaire doit être revalorisée, et le débiteur averti du nouveau
montant qu'il a à verser.
Où s'adresser ?
À un huissier du lieu de sa résidence
Le créancier de la pension alimentaire peut
charger du paiement direct tout huissier de justice du lieu de sa
résidence. Cette proximité n'existe que pour ce type de procédure. Par
exemple, si madame Dupond habite avec ses enfants à Issoudun (Indre),
alors que son ex-mari habite à Bourges (Cher), elle peut s'adresser à un
huissier d'Issoudun. En revanche, pour un impayé de pension supérieur à
6 mois, c'est une procédure classique de recouvrement qui doit prendre
le relai, et l'huissier de justice territorialement compétent redevient
celui du domicile du débiteur : Bourges, dans l'exemple ci-dessus.
Comment ça marche ?
La pension est payée par l'employeur
Le paiement direct consiste à saisir
directement les rémunérations ou les créances du débiteur de la pension,
par l'envoi d'une simple notification de l'huissier, par lettre
recommandée : à l'employeur du débiteur s'il est salarié, à sa caisse de
retraite s'il est retraité, à Pôle Emploi s'il perçoit des indemnités
de chômage. Lorsque le débiteur de la pension est propriétaire d'un
logement qu'il a mis en location, la notification de paiement direct
peut être adressée, le cas échéant, à l'administrateur de biens qui
perçoit les loyers pour son compte. Dans tous les cas, l'huissier de
justice doit mettre en oeuvre la procédure dans les 8 jours à compter de
la demande. Toutefois, il faut qu'il dispose de toutes les informations
nécessaires sur l'identité du tiers saisi. Si le créancier de la
pension ne peut pas les lui fournir, l'huissier peut se les faire
communiquer par les administrations, services publics et organismes de
sécurité sociale. Dès réception de la notification, l'employeur (ou tout
autre tiers) exerce la retenue dès le premier versement de
rémunération, ou, s'il s'agit d'un compte bancaire, dès que les avoirs
le permettront. Les arriérés de pension, dans la limite de 6 mois, sont
prélevés par douzièmes avec les termes courants de la pension : ils sont
donc réglés au bout d'une année.
Combien ça coûte ?
Rien, pour le créancier de la pension
Les frais de la procédure de paiement direct
sont exclusivement à la charge de celui qui doit la pension alimentaire
(le débiteur). Ils sont prélevés sur sa rémunération en même temps que
les retenues effectuées pour le paiement de l'arriéré. Le bénéficiaire
de la pension n'a donc pas à en faire l'avance, et il n'a pas non plus à
les supporter dans le cas où la procédure serait finalement
infructueuse. Il en est de même avec la procédure de recouvrement
« classique », pour les pensions alimentaires dues au-delà des 6
derniers mois d'arriérés.
Remarque :
L'avis de l'expert Patrick Safar, Huissier de justice à Melun (Seine-et-Marne)
Le principal conseil à donner, c'est de ne pas attendre une accumulation de mensualités impayées, car plus on attend, plus c'est compliqué de recouvrer les sommes dues. Par exemple, si vous avez une année d'impayés, 6 mois seront couverts par le paiement direct et les 6 autres mois relèveront de la procédure ordinaire. Nous n'avons pas encore de retour en ce qui concerne le dispositif expérimental de garantie contre les impayés de pensions (qui a été mis en place depuis le 1er octobre 2014, dans 20 départements et seulement pendant 18 mois). Il s'agit de la principale nouveauté en matière de recouvrement. Il faut signaler aussi un changement récent : jusqu'en 2014, la procédure ordinaire de saisie était gratuite pour le créancier, mais en cas d'insolvabilité du débiteur, les frais étaient répercutés sur le créancier. Maintenant, il y a une totale gratuité pour lui, dans tous les cas. Pour compenser, les frais du paiement direct ont été doublés du côté du débiteur de la pension.