Martin Jean-Joseph est décédé à l’hôpital – Hospice de Bourg Saint Maurice à l’âge de 69 ans. Durant plus de 30 ans, il a exercé dans la paroisse la fonction de
sonneur, avec une ponctualité et une régularité exemplaires. Tellement lié à) son clocher et à ses cloches, on ne pouvait guère penser ç l’un sans évoquer l’autre. Ses forces déclinant et devant la difficulté de lui trouver un successeur, il a bien fallu procéder à l’électrification des cloches, mais il faut avouer que la mécanique n »a plus cette liberté d’expression, ce laisser-aller, cet élan, voire cette hésitation qui savait leur donner Mr Martin.
Jean-Joseph avait sa manière à lui de « faire parler » les cloches. Légèrement sourd, il était délicieux quand il fredonnait, d’une voix qu’il croyait juste, un air tout différent de celui qu’il croyait carillonner. Fidèle à la tradition, attaché à la coutume, il n’admettait pas aisément qu’on pût varier ; habitué à sonner les « classes » qui, longtemps, ont distingué les membres de la société, quand celles-ci furent radicalement supprimées, Mr Martin en fut un instant désemparé ! C’est quand il mettait en branle la grosse cloche de 1.500 kg qu’il était à son affaire ; ce bâton qu’il avait adapté au battant, pour l’empêcher d’osciller durant les premiers efforts d’élancement, il avait un chic remarquable pour le décrocher à la seconde précise où la sonnerie devait atteindre son plein et puissant effet immédiat.
Les cloches, c’était sa vie. Il était fier de ses cloches, il en parlait avec amour. Quand il voulait honorer particulièrement quelqu’un qu’il estimait méritant, les cloches parlaient plus longtemps, tandis qu’un parpillot de chrétien avait droit à a portion congrue. Se trompait-il tellement ? Nous le saurons au jugement !
Original dans sa démarche légèrement sautillante avec ses deux mains derrière le dos, il ne l’était pas moins dans sa conversation souvent émaillée de traits spirituels et ponctuée d’un rire bien franc. Ses derniers jours ont été marqués par la souffrance chrétiennement supportée et offerte. Tant de fois il a invité les fidèles au rassemblement pour la prière que le Père daignera accueillir son fidèle « sonneur ». Au jour de sa sépulture, les cloches, ses « cloches », ont sonné pour lui ; elles avaient, semblait-il, un langage spécial, elles pleuraient leur...ami !
Ce texte est le texte paru dans le bulletin paroissial de juillet 1951
Il a été produit par Joseph CANOVA
Prochainement nous développerons d’autres sujets relatifs à notre PATRIMOINE et ce grâce à ces bénévoles qui vont nous permettre de lire le passé pour mieux pénétrer dans l’avenir, sinon comprendre le présent.
Pierre VILLENEUVE
Merci à Joseph CANOVA
Merci à celles et ceux qui ont permis cette rubrique désormais traditionnelle.
Merci enfin à Jean-Luc Penna qui a bien voulu nous éclairer quant à l’existence des 4 cloches et de « la mauriennaise » qui a occupé le clocher de Bourg Saint Maurice. Ainsi Jean-Joseph Martin a su jouer du piano dans le clocher et mettre en accord « parfait « la Haute-Tarentaise et la Maurienne..Mais nous y reviendrons sur un prochain sujet !