mercredi 1 février 2023

LA HAUT SUR LA MONTAGNE..... IL Y AVAIT UN BEAU CHALET !


                                 IL ÉTAIT UNE FOIS UN CHALET D'ALPAGE !

A la lecture de ce texte intégral de Dominique et Isabelle, le chalet d'alpage prend toute sa vraie place dans ces crêtes alentours. Des générations entières de familles ont accompli, durant des décennies, cette transhumance, cette estive, ces emmontagnées et démontagnées au rythme des saisons certes mais aussi des pâturages en altitude.

Ainsi cette pierre polie caressée au gré des saisons et des âges à l'entrée du chalet, ces poutres balancées au cœur des âmes éternelles, cette étable et cet havre de paix rythmés au gré de la traite, ces tranches de pain et de Beaufort sinon de tomme, ces soupes mijotées au feu de bois,ce chien de garde, ce bruit de bidons, resteront à jamais la vraie vie. Cet avec ces gens de là haut que l'on se découvre, qu'on apprend à aimer, qu'on construit cette identité familiale. Regardez donc ces rides, ces cals, ces cicatrices du travail accompli, ces bancs tels ce lieu de paroles, d'échange, de savoir-faire, de traditions, d'apprentissage, de découverte de soi même.

Désormais, à l'envi, à l'heure de passer prés de ces chalets d'altitude, arrêterez vous un instant, ayez une pensée profonde, humaine, reconnaissante.

Alors viendra le moment de le transmettre aux générations futures, viendra aussi le temps de changer de propriétaire, mais le chalet doit continuer à vivre et de garder sa solidité et son socle. Mais au delà de cet aspect douloureux certes, retenons ensemble que dans ce chalet il y a quelque chose d'éternel..C'est le volume de cette intimité, c'est la grandeur de enfants élevés dans ce nid d'amour avec cette paille empruntée à l'étable, sa mémoire, son histoire, ces soirées, ces labeurs en sont le crépis à jamais taloché !

Le chalet vivra encore...Il faudra se résoudre, mais à l'instant d'un détour, il vous fera un signe avec cette fumée intergénérationnelle ! Il suffira toujours et encore de pousser cette porte des secrets de famille,dont vous détenez, seul, la clé  !

Pierre VILLENEUVE

( le texte ci dessous a été publié avec autorisation )

 

 

"Nostalgie, quand tu nous tiens…

J'avais acheté ce chalet en 1996 avec Isabelle, ne pouvant espérer acheter une résidence principale bien trop chère en Tarentaise. La vie en H.L.M a du bon lorsque l'on est enfant mais passé cet âge, ce n'est plus la même chanson…

L'achat d'un chalet nous permettait de nous évader certains week-ends et me permettait d'avoir un support pour bricoler et me reconstruire après une opération du dos.

Ce joli chalet avait beaucoup de caractère mais il était en bien mauvais état, délaissé par un Berlinois spéculateur, propriétaire durant 10 ans et qui ne l'avait pas dorloté comme on pourrait dorloter le fameux ''coussin Berlinois''.

J'y ai passé des nuits seul, à dormir au milieu des cavalcades de souris. J'y ai mis beaucoup de sueur à retaper le bas et les abords de ce chalet qui avait connu durant la guerre de 39/45 une résidente des Chapelles qui l'habitait à l'année et qu'un chien ravitaillait en allumettes l'hiver.

Oui j'ai la nostalgie des soirées avec les enfants, tous allongés à scruter les étoiles filantes et à repérer les constellations de la voie lactée. Me ramenant à la nostalgie de mes nombreux camps scouts.

Oui j'ai la nostalgie de ce chalet, du temps passé avec les enfants à chercher et planter : mélèzes (certains viennent de Planjo), bouleaux (l'un a été prélevé sur un rocher dans le lit de l' Arbonne suite à la plus grosse crue de ces dernières décennies), sapins et à les arroser chaque été, notamment en 2003, célèbre pour sa terrible sécheresse.

Oui j'ai la nostalgie d'une cabane en bois pour les enfants, construite avec l'une de mes filles dans notre garage HLM du Tétra-Lyre.

Oui j'ai la nostalgie de monter en raquettes l'hiver, d'y faire sa trace et d'y rencontrer des randonneurs se reposant sur un banc archaïque construit à leur intention.

Oui j'ai la Nostalgie de lézarder au soleil par un belle et sereine journée d'automne, face à la pointe de l'Aliet, en me disant que c'est sûrement çà... le Paradis. Paradis que mon beau-père Bernard arpente peut-être désormais depuis son récent départ.

Oui j'ai la nostalgie  et de me rappeler d'avoir participé avec Jacques Plassiard à des sorties montagne avec Jean-Luc Valomy fin des années 70. Nous étions ''accompagnateurs'' et j'en garde de bons souvenirs.Jean-Luc était bien jeune et moi, un peu moins vieux. Il est parti quelques jours avant mon beau-père,

Oui j'ai la nostalgie d'une vie simple, sans eau courante, sans électricité, sans confort. Mais une vie plus vraie, plus sincère, plus respectueuse qui demande des efforts, du courage et qui nous fait réfléchir sur la course en avant de notre société à vouloir toujours plus pour toujours moins cher. Et qui nous rappelle combien nos anciens ont bataillé pour nous offrir la liberté, la richesse, le confort !

Oui j'ai la nostalgie des repas entre amis à l'ombre des sapins, autour d'un simple pique-nique, où l'on aimait à se retrouver pour refaire le monde et la Haute-Tarentaise.

Oui j'ai la nostalgie des cris des marmottes, des cris des buses apprenant à leurs petits, leur premier vol.

Oui, j'ai la nostalgie d'une improbable rencontre avec une salamandre au petit matin, aux premiers rayons de soleil en allant puiser l'eau à la source proche.

Oui, j'ai la nostalgie de la présence rassurante des bovins et des ânes me tenant compagnie à proximité du chalet.

Mais je n'ai pas la nostalgie de l'architecte des bâtiments de France de Savoie qui exige des conditions draconiennes pour retaper un chalet d'alpage alors que son collègue du Cantal accepte les ''velux'' sur les toits des burons. Il n'est pas là pour aider mais pour emmerder et flatter son égo d'architecte qui sait soi-disant tout et qui détient seul, la vérité.

Mais… cette nostalgie est atténuée quand je sais que Mathieu, qui me l'a acheté en nov 2017, originaire de Pralognan, le retape à merveille et bien mieux que je ne l'aurais fait et saura en faire un petit paradis pour ses enfants.

Il y trouvera autant de plaisir que moi à y monter régulièrement pour y trouver, calme, beauté, sérénité et surtout...simplicité, lui l'amoureux de la randonnée et de la montagne.

Ce chalet renaît et côtoiera encore plusieurs générations, il survivra à notre boulimie de destruction du monde vivant qui nous entoure."