Congés payés
Vacances : quel sort pour les jours non pris ?
À l'approche
des vacances d'été, il est peut-être temps de faire le point sur votre
solde de congés payés car, à terme, le reliquat non pris finira par être
définitivement perdu. À moins de profiter des dispositifs permettant
leur report ou leur conversion en euros.
C'est à prendre ou à laisser... Légalement,
les congés payés présentent la particularité d'une double contrainte.
D'un côté, votre employeur est tenu de vous accorder, chaque année, un
nombre précis de jours de vacances tandis que, de votre côté, vous avez
l'obligation de les prendre... Ainsi, si vous décidez délibérément de ne
pas profiter de l'intégralité de vos congés, vous êtes perdant car les
jours non soldés sont, en principe, définitivement perdus et il n'est
pas possible de les convertir en espèces sonnantes et trébuchantes
(cass. soc. 26 mars 2014, n° 12-29324). L'obligation de prendre chaque
année l'intégralité de vos congés payés connaît toutefois des
tempéraments. Certaines situations vous permettent d'épargner les jours
non pris pour les solder ultérieurement, voire pour les transformer en
rémunération différée ou en indemnités compensatrices.
Report en cas d'absence justifiée
Sauf disposition contraire de la convention
collective appliquée dans votre entreprise, vous avez jusqu'au
31 octobre prochain pour solder vos congés payés (les 4 semaines hors 5e
semaine) acquis au titre de la période de référence 2014-2015. Si tel
n'est pas le cas, vous allez perdre le reliquat... à moins que vous
n'ayez été dans l'impossibilité de le prendre pour un motif légitime
(congé de maternité, maladie, par ex.). En effet, la réglementation
européenne, reprise par la Cour de cassation, impose le report des
congés non pris en cas d'accident du travail ou de maladie
professionnelle (cass. soc. 27 septembre 2007) ou même, plus récemment,
de simple arrêt maladie (cass. soc. 16 février 2012, n° 10-21300). Ce
report est de droit, et le fait, pour un salarié, d'avoir signé un
document dans lequel il reconnaît avoir soldé ses congés est sans effet
et ne le prive pas du report (cass. soc. 28 mai 2014, n° 12-28082). Mais
en dehors de ces cas d'empêchement, vous avez aussi la possibilité de
négocier avec votre employeur. Quelle que soit la position adoptée par
la convention collective appliquée dans l'entreprise, dans le cadre de
son pouvoir de direction, il peut décider de vous accorder un report
(cass. soc. 9 janvier 2013, n° 11-21.758). En revanche, inutile de
tenter de négocier leur paiement, car seuls les cas limitativement
prévus par la loi l'autorisent.
FINANCEMENT D'UN FUTUR LONG CONGÉ
Le paiement des congés non pris n'est possible
que si vous avez un projet personnel à long terme. Si vous souhaitez
prendre un congé sabbatique, un congé pour créer votre entreprise ou
pour prendre un poste de direction au sein d'une jeune entreprise
innovante, vous pouvez, avec l'accord de votre employeur, pendant six
années maximum, mettre de côté votre 5e semaine de congés
payés – vos vacances d'été n'entrent pas dans le dispositif – ainsi que
tous vos autres jours de repos supplémentaires (c. trav. art.
L. 3142-100). Avec, à la clé, leur conversion en euros. Au moment où
vous prenez effectivement votre congé, une indemnité compensatrice vous
est versée en fonction du nombre de jours de congés non pris. Si vous
renoncez finalement à votre projet, pour une raison ou pour une autre,
les jours capitalisés ne vous sont pas payés mais doivent être pris par
périodes de six jours par an jusqu'à l'apurement complet du solde.
PLACEMENT SUR UN COMPTE ÉPARGNE-TEMPS
L'ouverture d'un compte épargne-temps (CET)
vous permet également d'y placer une fraction de vos congés. Mais il
faut, pour cela, qu'un accord collectif ait prévu sa mise en place dans
l'entreprise. Le CET permet de capitaliser des droits à congés rémunérés
ou de bénéficier d'une rémunération, immédiate ou différée.
Concrètement, vous pouvez y placer votre cinquième semaine de congés
payés et, le cas échéant, les congés supplémentaires accordés par votre
employeur ainsi que vos jours de RTT ou de repos compensateur. Ceci afin
de percevoir une rémunération durant une future période d'absence
(congé sans solde, congé de formation, etc.), de bénéficier d'un
complément de rémunération (passage à temps partiel, cessation
progressive d'activité, etc.) ou de vous constituer un complément de
revenu différé en alimentant un plan d'épargne salariale (PEE, PEI,
Perco). Avec toutefois un bémol important puisque vous ne pouvez pas
convertir en euros votre 5e semaine de congés payés placée dans un CET, sauf départ de l'entreprise (c. trav. art. L. 3153-2).
INDEMNITÉ COMPENSATRICE
La dernière possibilité de convertir en euros
vos congés payés non pris suppose que vous ayez été empêché de les
solder. Soit à cause de votre employeur, qui est alors systématiquement
condamné au versement de dommages-intérêts, soit – hypothèse beaucoup
plus fréquente – parce que vous quittez définitivement l'entreprise. La
rupture de votre contrat de travail, quel qu'en soit le motif
(démission, fin de CDD, rupture conventionnelle ou licenciement) vous
donne obligatoirement droit au versement d'une indemnité compensatrice,
correspondant aux congés que vous avez acquis mais que vous n'avez pas
eu le temps de prendre. Seul un licenciement pour faute lourde peut
faire perdre le bénéfice de cette indemnité compensatrice. Mais une
telle sanction ne porte que sur les congés payés acquis au titre de la
période de référence en cours – celle du 1er juin 2015 au 31 mai 2016 – et non pas sur ceux que vous avez acquis avant le 1er juin de cette année.
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Congé parental
En France, le salarié qui prend un
congé parental d'éducation intégral, et qui cesse totalement de
travailler, perd le bénéfice des congés payés acquis avant le congé
parental s'il revient après la clôture de la période de prise des congés
(cass. soc. 28 janvier 2004, n° 01-46313).
Il n'a droit ni au report ni à une indemnité compensatrice.
Toutefois, cette jurisprudence
pourrait changer car la Cour de justice de l'Union européenne estime
qu'en pareil cas, le salarié a droit au report et qu'une telle perte est
contraire au droit communautaire (CJUE, 22 avril 2010, aff. C-486/08).