Réforme 2019 : ce qui devrait changer
Notre système actuel de retraite multi
régime va disparaître pour laisser la place à un régime universel où
tous les actifs seront logés à la même enseigne. Si l'âge légal de
départ demeurera fixé à 62 ans, tout le reste va être revu de fond en
comble.
La grande réforme des retraites
annoncée par le Président Macron est en gestation. Quand elle aboutira,
les 42 caisses de retraite qui cohabitent actuellement, avec leurs
règles propres, laisseront place à un régime unique qui gérera
indistinctement les retraites des salariés, des fonctionnaires, des
indépendants et des assujettis à des régimes spéciaux (SNCF,
RATP, etc.). « Une réforme nécessaire tant la situation actuelle est inégalitaire »
applaudit Valérie Batigne, fondatrice et présidente de
Sapiendo-retraite. Le 10 octobre dernier, le haut-commissaire à la
réforme des retraites, Jean-Paul Delevoye, a présenté l'articulation
générale du dispositif.
ÂGE LÉGAL DE DÉPART INCHANGÉ
La retraite universelle ne touchera pas
à l'âge minimum de départ qui restera donc fixé à 62 ans. La mise en
place d'un éventuel « âge pivot » pour inciter les assurés à partir plus
tard, avec un système de décote-surcote, ne figure pas dans le projet
initial mais pourrait être laissée à l'appréciation des partenaires
sociaux. « Le bonus-malus qui va être mis en place au 1er janvier 2019 à l'Agirc-Arrco constitue déjà les prémices d'un âge pivot »
rappelle Valérie Batigne. Par ailleurs, lors de la deuxième phase de
concertation, programmée de décembre 2018 à mai 2019, sera abordé le
traitement des départs anticipés à la retraite (pour carrière longue,
handicap, métiers pénibles, etc.).
UN SYSTÈME PAR POINTS
Le futur système de retraite ne
fonctionnera plus par annuités et taux de remplacement d'un salaire
moyen (comme l'actuelle retraite de base ou celle des fonctionnaires)
mais par points. « Un système semblable à celui de la retraite complémentaire Agirc-Arrco qui existe depuis plus de 70 ans »
souligne Emmanuel Grimaud, président de Maximis Conseil. Il restera
fondé sur la répartition et la solidarité - et non pas sur la
capitalisation- principes en vertu desquels les actifs financent par
leurs cotisations les pensions versées aux retraités.
Dans le nouveau régime, tous les actifs
cotiseront sur leurs revenus d'activité dans la limite de 3 plafonds de
Sécurité sociale (soit 119 196 € pour l'année 2018) avec pour principe
général : un euro cotisé donnera les mêmes droits à chacun. L'actuelle
prise en considération des 25 meilleures années, dans le secteur privé,
et des 6 derniers mois, dans la Fonction publique, sera ainsi abandonnée
(en revanche, les primes seront prises en compte). Une équité qui plaît
à Emmanuel Grimaud : « le mode de calcul actuel pénalise les personnes qui ont une carrière atypique, comme les femmes ou les chômeurs ».
Selon lui, un système à points compensera mieux les carrières faibles
ou hachées. Tous les fonctionnaires, eux, ne devraient pas être
gagnants.
AMÉNAGEMENTS POUR LES INDÉPENDANTS
Universalité de la retraite oblige: en
principe, tous les actifs devraient cotiser au même taux. Ce qui va
poser un problème pour les travailleurs indépendants dont le taux de
cotisation est actuellement très inférieur à celui des salariés du privé
(15 % contre 28 % environ). De plus, leurs cotisations portent sur une
assiette de rémunération nette et non pas brute, comme les salariés. Ils
bénéficieront d'un régime de cotisations adapté, pour tenir compte de
leur taux de cotisation spécifique, dont les modalités ne sont pas
encore fixées. « Il serait souhaitable que la loi leur permette
d'avoir des cotisations optionnelles supérieures lorsqu'ils réalisent
une bonne année, par exemple » suggère Emmanuel Grimaud.
NOUVEAUX DROITS FAMILIAUX
La retraite universelle attribuera des
points de retraite pour chaque enfant, dès la naissance du premier. La
situation actuelle est très disparate. Le régime général octroie 8
trimestres d'assurance retraite aux mères dès la première naissance
alors que la Fonction publique, par exemple, n'en accorde que deux.
Inversement, l'arrivée d'un quatrième enfant ouvre droit à une
majoration de la pension de 15 % pour les fonctionnaires et seulement
10 % de bonification pour les deux parents dans le secteur privé. La
pension de réversion, elle, ne serait pas remise en cause.
MAINTIEN DES DROITS ACQUIS
Même si la réforme devait être votée en
2019, ses effets ne seront pas immédiats. Non seulement les personnes
déjà à la retraite ne seront pas concernées mais les actifs qui seront à
moins de 5 ans de l'âge de départ (62 ans) lors de l'adoption de la loi
resteront soumis aux règles actuelles (les plus de 57 ans donc). Le
temps d'opérer en douceur le basculement des régimes actuels vers le
régime unique, « sans générer de perte de droits pour les assurés », insiste le haut commissaire Delevoye.
Au moins 2 caisses de retraite par Français
Compte tenu de leur parcours
professionnel, les Français sont, actuellement, très majoritairement
affiliés à plusieurs régimes de retraite, de base et complémentaire :
- 36 % sont affiliés à 2 régimes ;
- 28 % dépendent de 3 régimes ;
- 18 % sont rattachés à 4 régimes ;
- 11 % sont affilés à 5 régimes ;
- 4 % des Français dépendent d'au moins 6 régimes.
Seuls 3 % de Français ne relèvent que d'un seul régime de retraite.
(Ministère des Solidarités et de la Santé)
PRIME DES FONCTIONNAIRES
Dans le cadre de la retraite
universelle, les fonctionnaires verront l'intégralité de leurs primes
prise en compte pour le calcul de leurs droits à retraite.
Actuellement, seule une partie est
convertie dans le cadre du régime additionnel de la fonction publique
(RAFP) : l'ensemble de ces éléments de rémunération est pris en compte
dans la limite de 20 % du montant du traitement indiciaire brut annuel.
Cette retraite complémentaire vient s'ajouter à la retraite de base.