Famille et transmission : aider un de ses enfants à devenir propriétaire
Acheter
un logement s'avère très compliqué pour les jeunes. Un coup de pouce
financier de leurs parents peut être déterminant sachant qu'il peut
prendre différentes formes : donation, prêt, achat en commun.
C'est bien connu : s'installer sous son toit
est d'autant plus facile que l'on dispose déjà d'un bel apport
financier... À défaut, des parents « à l'aise » financièrement et
généreux peuvent aider les enfants - souvent trentenaires - à faire un
premier achat immobilier. Selon une étude de l'Insee publiée fin 2014, «
recevoir une donation avant l'âge de 35 ans est associé à une
probabilité d'achat 2,3 fois supérieure à celle d'un ménage qui n'en a
pas reçue. Cela desserre la contrainte de financement et permet de moins
s'endetter ».
Plus de 9 Français sur 10 souhaitent acquérir
leur résidence principale. Pourtant, les jeunes ont beaucoup de mal à
accéder à la propriété. En cause : la flambée des prix immobiliers
enregistrée entre 2000 et 2008 à Paris et dans de nombreuses villes de
province. En outre, obtenir un crédit immobilier auprès d'un
établissement bancaire est loin d'être simple. Si les taux d'intérêt
sont désormais très bas (ils oscillent actuellement entre 1,90 et 2,50 %
sur 20 ans), les banques n'ont pas assoupli leurs conditions pour
décrocher un emprunt. « Il faut montrer patte blanche en disposant au
moins des frais de notaire. Et plus l'apport est élevé, plus le taux
auquel on emprunte est attractif », constatent les courtiers en prêt
immobilier. Dans ce contexte, les enfants qui bénéficient d'un coup de
pouce de leurs parents ont plus de chances de devenir propriétaires. «
L'aide financière dépend évidemment des moyens financiers des parents et
du nombre d'enfants que compte la famille », précise Nathalie Couzigou-
Suhas, notaire à Paris. « La probabilité qu'un ménage dont la personne
de référence est âgée de moins de 40 ans, et qui n'a pas reçu de
donation, devienne propriétaire est de 54 %. Elle s'élève à 70 % en cas
de donation, ajoute l'étude de l'Insee. Depuis les années 2000, en
période haussière des prix, le lien entre donation et achat immobilier
s'est renforcé car cette dernière facilite la constitution de l'apport
personnel. »
Faire une donation à son enfant
La donation reste, en effet, le moyen le plus
efficace pour aider l'un de ses enfants. Chaque parent peut transmettre à
son enfant jusqu'à 100 000 € en liquidités, biens meubles, immeubles ou
même en titres financiers (portefeuille de valeurs mobilières) sans
payer d'impôts. Par ailleurs, « un don supplémentaire de 31 865 €
exonéré peut s'ajouter, à condition que le donateur soit âgé de moins de
80 ans et que celui à qui l'on donne soit majeur », relève Nathalie
Couzigou-Suhas. Au total, un enfant peut donc recevoir 263 730 € de ses
deux parents tous les 15 ans sans régler de droits. Au-delà, les sommes
sont imposées en fonction de leur montant selon un barème progressif de 5
à 45 %.
Il faut néanmoins rester très vigilant en
présence de plusieurs enfants. « Une donation simple est considérée
comme une avance sur la part d'héritage qui doit être rapportée à la
succession pour sa valeur au jour du décès du donateur », explique
Nathalie Couzigou-Suhas. Par exemple, si 50 000 € ont été donnés pour
acquérir un logement, qui a doublé de valeur depuis, ils seront
rapportés pour 100 000 € à la succession. Pour éviter ce problème, les
parents ont intérêt à faire une « donation-partage » qui permet de figer
la valeur des montants donnés au jour de la donation et d'éviter tout
sentiment d'inégalité entre les héritiers lors de la succession du
donateur. Cet acte doit être réalisé chez un notaire. Au cas où les
parents n'ont pas les moyens de donner à tous leurs enfants au même
moment, ils peuvent le faire à terme. Cela en réintégrant dans une
donation-partage tout ou partie de ce qu'ils ont précédemment donné à
chacun de leurs enfants. Dans ce cas (réintégration), la
donation-partage peut être réalisée à tout moment, mais moyennant le
paiement d'un droit de partage de 2,5 % dû au Trésor public, qui
s'ajoute aux droits de donation.
Acheter en commun le logement
Autre solution : les parents et l'enfant
peuvent acheter un logement en commun, chacun à hauteur de leurs moyens
respectifs. Le bien tombe dans l'indivision, l'enfant en détenant, par
exemple, 40 % et ses parents 60 %. « Cela implique de bien s'entendre
puisque aucune décision importante ne peut être prise sans l'accord des
indivisaires. Par exemple, en cas de travaux, les décisions doivent être
adoptées en concertation. Quant à la revente du logement, elle requiert
l'accord de tous, précise la notaire. Une convention d'indivision peut
aussi être rédigée pour fixer ses règles de fonctionnement. » Quelques
années plus tard, les parents peuvent transmettre leurs parts
d'indivision à l'enfant dans un testament. Ou bien, ils peuvent lui
céder leurs parts et devront régler un impôt en cas de plus-value
immobilière.
Les parents peuvent aussi créer une société
civile immobilière (SCI) qui sera propriétaire du bien. Dans ce cas, ils
en sont associés avec leur enfant, chacun détenant des parts de la
société à hauteur de son apport financier. La constitution d'une SCI est
relativement coûteuse (entre 2 000 et 2 500 €) et ses règles de gestion
sont contraignantes. En revanche, elle facilite la transmission du bien
tout en assurant un droit de regard sur la gestion du bien immobilier.
« Toutefois, prévient Nathalie Couzigou-Suhas, la SCI est destinée aux
parents qui souhaitent conserver la mainmise sur le logement. Ce qui
n'est pas forcément une situation évidente pour l'enfant et cela peut
créer des tensions au sein de la famille. »
Consentir un prêt familial dans les formes
Pour aider leur enfant à acheter, les parents
peuvent lui consentir un prêt à un taux d'intérêt modique qu'il
remboursera dans quelques années. Cela permet de bénéficier d'un apport
plus élevé et donc d'obtenir de meilleures conditions d'emprunt auprès
des banques. Ce prêt familial doit être formalisé et comporter un taux
d'intérêt, même symbolique, pour ne pas générer de conflits en présence
de frères et soeurs. Les autres membres de la famille peuvent, en effet,
considérer qu'un de leurs frères ou soeurs a été avantagé par leurs
parents. Dans ce cas, il est recommandé de rédiger une reconnaissance de
dette précisant le montant du prêt, son délai de remboursement et son
taux d'intérêt. Le contrat peut aussi être établi et enregistré avec
l'aide d'un notaire pour une centaine d'euros. « Toute somme supérieure à
1 500 € doit être déclarée pour éviter une requalification en